Cancer : découverte d’un marqueur biologique très prometteur par des chercheurs de l’Inserm
Une molécule absente de la plupart des tissus normaux chez l’homme a été découverte dans onze types de cancers. Des chercheurs de l’Inserm dirigés par Nicolae Ghinea montrent que la présence du récepteur de la FSH (hormone folliculo stimulante) reflète l’existence d’une tumeur cancéreuse chez plus de 1300 patients. L’étude à paraître le 21 octobre 2010 dans NEJM est le résultat d’une collaboration avec l’équipe de Aurelian Radu du Mount Sinai School of Medicine, New York.
L’hormone folliculo stimulante ou FSH a pour cible les organes reproducteurs humains : ovaires et testicules. Chez la femme, elle stimule la maturation des follicules ovariens et la production d’œstrogènes (via son action sur les cellules de la granulosa). Chez l’homme elle stimule la production des spermatozoïdes (via son action sur les cellules de Sertoli). Le récepteur de la FSH, qui fait l’objet du travail mené par les chercheurs de l’Inserm, se trouve normalement localisé uniquement dans les cellules stimulées par la FSH (cellule de la granulosa chez la femme, cellules de Sertoli chez l’homme). Toutefois, il est présent en très petite quantité dans les vaisseaux sanguins des ovaires et des testicules…et c’est ce qui a mis la puce à l’oreille des chercheurs.
Le réseau vasculaire est effectivement l’un des constituants les plus importants des tumeurs cancéreuses. Il est nécessaire à leur croissance et leur maintien dans l’organisme. La plupart des tumeurs cancéreuses sont même capables de créer de nouveaux vaisseaux afin de survivre. Les chercheurs ont donc conduit une étude approfondie visant à déterminer si le récepteur de la FSH était présent dans les vaisseaux sanguins des tumeurs.
1336 patients et onze cancers
Nicolae Ghinea et ses collaborateurs de l’Inserm ont étudié des biopsies prélevées chez 1336 patients atteints de cancer après une chirurgie. La présence du récepteur de la FSH a été contrôlée dans des tumeurs allant d’un stade très précoce à des stades plus tardifs pour onze types de cancer (prostate, sein, colon, pancréas, vessie, rein, poumon, foie, l’estomac, testicules, et ovaires). Les résultats obtenus démontrent la présence du récepteur dans la totalité des échantillons, quels que soient le type et le stade de la tumeur. A contrario, ce récepteur est totalement absent de l’ensemble des autres tissus normaux de l’organisme y compris le tissu normal de l’organe porteur de la tumeur.
Une simple détection par imagerie
De façon générale, les vaisseaux sanguins qui expriment le récepteur de la FSH se trouvent à la périphérie de la tumeur. Le récepteur, quant à lui semble spécifiquement localisé sur la partie dite luminale des cellules qui tapissent la paroi des vaisseaux ce qui fait de lui une cible facile pour les agents de diagnostic et thérapie injectés dans le sang.
Ces deux caractéristiques (absence des tissus normaux et localisation sur la partie luminale des cellules endothéliales) en font un marqueur biologique très prometteur et un candidat intéressant pour l’imagerie et la thérapie. Des expériences de détection par imagerie ont d’ores et déjà été effectuées avec succès par les chercheurs chez la souris.
Vers une confirmation clinique
De nouvelles expériences sont nécessaires pour confirmer la détection du récepteur de la FSH en testant des procédures d’imagerie utilisées couramment à l’hôpital (RMN, TEP, et imagerie par ultrasons). Pour les chercheurs il est par ailleurs probable qu’il puisse être une cible générale pour des médicaments anti-cancéreux mais également pour des agents qui détruisent ou bloquent les vaisseaux sanguins des tumeurs.
Source : « Expression of Follicle-Stimulating Hormone Receptor in Tumor Blood Vessels »
Aurelian Radu, Ph.D., Christophe Pichon, Ph.D., Philippe Camparo, M.D.,Martine Antoine, M.D., Yves Allory, M.D., Anne Couvelard, M.D., Gaëlle Fromont, M.D., Mai Thu Vu Hai, Ph.D.,and Nicolae Ghinea, Ph.D.
From Mount Sinai School of Medicine, New York (A.R.); and Inserm Unité 753, Villejuif (C.P.), Val-de-Grâce Hospital, Paris (P.C.), Tenon Hospital, Paris (M.A.),Inserm Unité 955-Eq 07, Université Paris-Est, Créteil (Y.A., M.T.V.H., N.G.), Beaujon Hospital, Clichy (A.C.), and Centre Hospitalier Universitaire de Poitiers, Poitiers (G.F.)
N Engl J Med 2010;363:1621-30. 21 octobre 2010