Nouvelle piste thérapeutique dans les tumeurs d’Ewing
Une équipe de l’Institut Curie et de l’Inserm dirigée par le Dr Olivier Delattre vient de découvrir une nouvelle cible thérapeutique pour les tumeurs d’Ewing, un cancer qui touche près de 100 enfants et adolescents en France chaque année. Dans Cancer Research du 29 août 2012, les chercheurs montrent qu’en inactivant la protéine PRKCB, ils empêchent la progression tumorale. Or des inhibiteurs de la PRKCB sont actuellement en cours de développement ; ils pourraient, à terme, faire partie de l’arsenal thérapeutique contre la tumeur d’Ewing.
Chaque année, en France près de 100 nouveaux cas de tumeur d’Ewing sont diagnostiqués chez l’enfant, l’adolescent et le jeune adulte. Aujourd’hui, les formes localisées sont traitées, dans la majorité des cas, par une combinaison initiale de chimiothérapie et de chirurgie. Toutefois, au moment du diagnostic, un quart des jeunes patients sont déjà porteurs de métastases. Malgré les progrès déjà réalisés, la recherche de nouvelles thérapies pour les formes avancées est primordiale pour améliorer encore leur pronostic.
C’est l’une des préoccupations majeures de Franck Tirode, chargé de recherche Inserm à l’Institut Curie dans l’équipe du Dr Olivier Delattre (Unité génétique et biologie des cancers Inserm 830/Institut Curie).
Partant de la découverte de l’anomalie chromosomique responsable de la tumeur, il a cherché à identifier les cibles en aval de cette altération. « C’est ainsi que nous avons découvert le rôle majeur de la protéine kinase PRKCB dans le développement de la tumeur d’Ewing. Cette dernière est cruciale pour la survie cellulaire in vitro et le développement tumoral in vivo. » explique Franck Tirode. D’ailleurs, la surexpression de PRKCB est présente dans toutes les tumeurs d’Ewing. C’est une véritable signature de ce cancer pédiatrique qui pourrait à terme devenir un marqueur diagnostique complémentaire de cette tumeur.
A l’instar de l’identification par cette même équipe de la protéine IGFBP31 qui a conduit à des essais cliniques ciblant la voie IGF1, l’identification de la PRKCB ‐ surexprimée dans les tumeurs d’Ewing à un taux beaucoup plus élevé que dans d’autres tumeurs ‐ laisse présager des possibilités thérapeutiques prometteuses. « En effet, la nature même de cette protéine en fait une cible idéale pour de nouvelles thérapies » ajoute le chercheur. Pour preuve, il existe déjà des inhibiteurs de la protéine PRKCB en cours d’essai clinique pour d’autres localisations tumorales chez l’adulte.
Toutefois, comme le conclut Franck Tirode, « le plus grand bénéfice en termes thérapeutiques viendra très certainement de l’association d’un inhibiteur de la PRKCB avec d’autres molécules dirigées contre des cibles spécifiquement activées dans les tumeurs d’Ewing, telle que la voie IGF1. »
1 La protéine IGFBP‐3 est désormais connue pour sa capacité à bloquer l’un des plus importants messagers cellulaires, le facteur de croissance IGF‐1. IGFBP‐3 est une cible thérapeutique pour bloquer la prolifération cellulaire anormale induite par IGF‐1.
Référence
Targeting the EWSR1‐FLI1 oncogene‐induced protein kinase PKC‐ß abolishes Ewing’s sarcoma growth
D. Surdez1,2, M. Benetkiewicz1,2, V. Perrin1,2, ZY. Han1,2, G. Pierron1,3, S. Ballet1,3, F. Lamoureux4,5, F. Rédini4,5, AV. Decouvelaere6, E. Daudigeos‐Dubus7,8, B. Geoerger7,8, G. de Pinieux9,O. Delattre1,2,3 , F.k Tirode1,2,*
1Institut Curie, 2INSERM U830, Unité de Génétique et Biologie des Cancers, 3Institut Curie, Unité de génétique somatique, 4LUNAM Universités, Université de Nantes, EA3822 : Laboratoire de Physiopathologie de la Résorption Osseuse et Thérapie des Tumeurs Osseuses Primitives, 5INSERM, UMR 957, 6 Dpt de Biopathologie, Centre Léon Bérard, 7Institut Gustave Roussy, Université Paris-Sud XI, 8CNRS, Laboratoire de Vectorologie et Thérapeutiques Anticancéreuses, UMR 8203, 9Service d’Anatomie Pathologique, CHU de Tours
Cancer Research, 29 août 2012, publication en ligne.
Source : Institut Curie