Complémentaire santé : un système « très protecteur » mais « peu efficient », selon la Cour des comptes
Dans un rapport rendu public fin juillet, la Cour des comptes constate que 96% des Français sont aujourd’hui couverts par une complémentaire santé. Néanmoins, l’institution met en exergue les limites du système mis en place et pointe du doigt des coûts élevés et des inégalités entre bénéficiaires.
À la demande de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, la Cour a en effet enquêté sur les complémentaires santé et en particulier la complémentaire santé solidaire (CSS, anciennement CMU-C et ACS). La cour constate ainsi la France a privilégié le recours aux assurances complémentaires afin d’atténuer le reste à charge des ménages, contrairement à plusieurs de ses voisins qui ont choisi de mettre en place un « bouclier sanitaire », c’est-à-dire un système de plafonnement des dépenses annuelles de santé des ménages.
Ainsi, de nombreuses mesures incitatives ont été prises et un dispositif public spécifique, la complémentaire santé solidaire, a été institué pour les personnes les plus fragiles financièrement. Aujourd’hui, la Cour constate que le système ainsi mis en place permet d’assurer à 96 % de la population « une protection parmi les plus complètes, bien qu’en partie inégalitaire et au prix de dépenses fiscales et sociales très élevées », soit près de 10 Md€.
Concernant la réforme du 100 % santé, entrée progressivement en vigueur en 2019, 2020 puis 2021, cette dernière est venue renforcer cette démarche. La réforme définit dans les trois principaux domaines (optique, dentaire et audioprothèse), dans lesquels les restes à charge, malgré l’intervention forte des assurances et mutuelles demeuraient élevés, des paniers de biens et de prestations à prix et caractéristiques prédéterminés faisant l’objet d’une prise en charge intégrale. Selon le rapport, cette réforme « s’est traduite par un réinvestissement important de l’assurance maladie sur des champs qu’elle avait eu tendance à abandonner au profit des complémentaires santé, à rebours d’un des scénarios préconisés par la Cour, qui visait à recentrer l’intervention de l’assurance maladie obligatoire par le transfert de certains champs (optique notamment) vers les assurances complémentaires ».
La cour estime notamment que le déploiement de cette réforme a été « contrarié » par la crise de la covid 19 et que « ses premiers résultats laissent cependant d’ores et déjà présager certaines difficultés ». Selon elle, l’équilibre financier de la réforme pourrait, au vu des premiers mois d’application, ne pas respecter les projections initiales et pourrait augmenter le niveau des cotisations que les assurés règlent à leur assurance ou mutuelle.
Afin de corriger les faiblesses du dispositif, la Cour propose plusieurs recommandations dans son rapport. Parmi elles : prendre l’arrêté d’application de la loi portant information sur les remboursements proposés par les complémentaires santé et contrôler sa bonne application, augmenter la périodicité et élargir le champ des études menées par la Drees et ou encore procéder, au bout de trois ans, au bilan de la réforme du 100 %santé.
Selon la Cour, ses mesures ne résolvent pas « totalement les problèmes les plus difficiles mis en évidence par l’enquête ». Un constat qui ouvrirait « la perspective de choix de plus long terme » : « mettre en place un bouclier sanitaire ; désimbriquer les interventions respectives de l’assurance maladie obligatoire et de l’assurance complémentaire ; approfondir la régulation existante, en assurant une transparence accrue des offres, tout en encadrant le niveau des frais de gestion, voire du prix des garanties elles-mêmes ».
Pour en savoir plus : consulter le rapport sur le site de la Cour des comptes