AB Science fait le point sur le développement du masitinib dans les formes progressives de la SEP suite à l’ECTRIMS 2024

AB Science fait aujourd’hui le point sur le développement du masitinib dans les formes progressives de la sclérose en plaques (SEP), suite à la conférence 2024 du Comité Européen pour le Traitement et la Recherche sur la Sclérose en Plaques (ECTRIMS).

Le développement du masitinib dans les formes progressives de la sclérose en plaques repose sur l’étude MAXIMS (AB20009), une étude de phase 3 randomisée en double aveugle du masitinib à la dose de 4,5 mg/kg/jour chez des patients atteints de sclérose en plaques progressive primaire (PPMS) ou de sclérose en plaques secondairement progressive non-active (nSPMS). L’étude inclut des patients avec un score EDSS (Expanded Disability Status Scale) compris entre 3,0 et 6,0, une progression de la maladie au cours des 2 dernières années et une absence de lésions cérébrales T1 rehaussées après injection de gadolinium. L’objectif principal de l’étude est d’évaluer l’effet du masitinib sur le délai avant progression confirmée du handicap.

Les récents résultats du tolebrutinib dans la sclérose en plaques secondairement progressive non-active (nSPMS), présentés lors de la conférence ECTRIMS 2024, renforcent l’hypothèse scientifique selon laquelle le ciblage de la microglie dans la nSPMS est une approche pertinente. Le tolebrutinib appartient à une classe de médicaments qui ciblent la microglie via une cible enzymatique appelée BTK (Bruton Tyrosine Kinase).

Le masitinib cible également la microglie mais via une cible enzymatique différente appelée M-CSFR1 (Macrophage Colony Stimulating Factor Receptor-1) et a généré des résultats positifs en phase 2B/3 (AB07002) [1], qui sont cohérents avec les résultats du tolebrutinib.

  • La progression de l’EDSS confirmée à 3 mois a été réduite de 37 % avec le masitinib dans l’étude AB07002 et de 23 % avec le tolebrutinib dans l’étude Hercules (bien que la réduction dans l’étude AB07002 n’ait pas atteint la p-value conventionnelle de 5 % dans la mesure où l’étude n’avait pas la puissance nécessaire pour détecter un effet statistiquement significatif sur ce critère, ayant 300 patients dans les bras masitinib à 4,5 mg/kg/jour ou placebo contre 1 100 patients dans l’essai Hercules).
  • La progression de l’EDSS confirmée à 6 mois a été réduite de 32 % avec le masitinib et de 31 % avec le tolebrutinib.

Plus important,

  • Le masitinib a amélioré de manière significative la dextérité manuelle mesurée par le test Peg à 9 trous, dans l’étude AB07002 (-4,28 ; p=0,0388).
  • Le masitinib a montré sa capacité à diminuer la concentration sérique de la chaîne légère des neurofilaments (NfL) dans un modèle animal de SEP et, par extension, possiblement les lésions neuronales [2].
  • Le masitinib ne cible pas seulement la microglie mais aussi les mastocytes, qui jouent un rôle crucial dans la SEP progressive et dans le modèle d’encéphalomyélite auto-immune expérimentale (EAE) de la SEP, comme le montrent de nombreuses publications [3-13].

Le masitinib bénéficie d’une importante base de données sur la tolérance du produit avec une exposition à long terme dans diverses indications. Dans les indications non oncologiques, environ 2 200 patients ont reçu au moins une dose de masitinib, plus de 1 300 patients ont reçu du masitinib pendant plus de six mois et près de 1 000 patients ont reçu du masitinib pendant plus d’un an.

Le profil de tolérance des inhibiteurs de BTK montre une augmentation des lésions hépatiques, de l’hypertension et des infections, ce qui semble être un effet de classe, laissant la place à des médicaments alternatifs.

En conclusion, le masitinib représente une alternative crédible potentielle aux inhibiteurs de BTK dans le développement de nouveaux médicaments tant dans la PPMS que dans la nSPMS.

Le Professeur Patrick Vermersch, MD, investigateur principal de l’étude MAXIMS, Directeur de l’Ecole Doctorale Biologie-Santé de l’Université de Lille, a commenté : « Les données sur le tolebrutinib sont importantes et ouvrent la voie à une série de nouveaux médicaments dans les formes progressives de SEP. Aux côtés des inhibiteurs de BTK, le masitinib représente une possible alternative sérieuse dans les deux formes de SEP progressive, la sclérose en plaques progressive primaire (PPMS) et la sclérose en plaques secondairement progressive non-active (nSPMS), qui restent les deux besoins médicaux non satisfaits. Le rôle des mastocytes ne doit pas être négligé dans la SEP ».

Ce nouveau développement s’accorde bien avec la stratégie actuellement mise en œuvre pour le masitinib, car il renforce encore les arguments scientifiques en faveur du développement du masitinib dans les formes progressives de la SEP ainsi que la plausibilité des résultats générés par l’étude de phase 2B/3 AB07002.

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[Références]

[1] Vermersch P, Brieva-Ruiz L, Fox RJ, et al. Efficacité et sécurité du masitinib dans les formes progressives de sclérose en plaques : un essai clinique randomisé de phase 3. Neurol Neuroimmunol Neuroinflamm. 21 février 2022 ;9(3) :e1148.

[2] Hermine O, Vermersch P, et al. Le masitinib limite les dommages neuronaux, mesurés par la concentration sérique de chaîne légère de neurofilaments, dans un modèle de maladie neurodégénérative d’origine neuro-immunitaire. Préimpression. bioRxiv 2024.03.07.583695 ; doi : https://doi.org/10.1101/2024.03.07.583695

[3] Sandhu JK, Kulka M. Décoder la communication mastocyte-microglie dans les maladies neurodégénératives. Int J Mol Sci. 22 janvier 2021 ;22(3) :1093.

[4] Pinke KH, et al. Les mastocytes devraient-ils être considérés comme des cibles thérapeutiques dans la sclérose en plaques ? Neural Regen Res. 2020 Nov;15(11):1995-2007.

[5] Pinke KH, et al. Calmer les mastocytes avec du kétotifène : une stratégie potentielle pour le traitement de la sclérose en plaques ? Neurotherapeutics. 2020 janv.;17(1):218-234.

[6] Brown MA, Weinberg RB. Mastocytes et cellules lymphoïdes innées : des acteurs sous-estimés dans la maladie démyélinisante auto-immune du SNC. Front Immunol. 2018 ; 9 : 514.

[7] Skaper SD, Facci L, Zusso M, Giusti P. Une vision centrée sur l’inflammation des maladies neurologiques : au-delà du front neuronal Cell Neurosci. 2018 ; 12 : 72.

[8] Hendriksen E, et al. Mastocytes dans la neuroinflammation et les troubles cérébraux Neurosci Biobehav Rev. 2017;79:119-133.

[9] Elieh-Ali-Komi D, Cao Y. Rôle des mastocytes dans la pathogenèse de la sclérose en plaques et de l’encéphalomyélite auto-immune expérimentale. Clin Rev Allergy Immunol. 2017;52(3):436-445.

[10] Conti P, Kempuraj D. Rôle important des mastocytes dans la sclérose en plaques. Mult Scler Relat Disord. 2016;5:77-80.

[11] Skaper SD, Facci L, Giusti P. Mastocytes, cellules gliales et neuroinflammation : partenaires dans le crime ?. Immunologie. 2014;141(3):314-327.

[12] Skaper SD, et al. Microglie et mastocytes : deux pistes sur la route de la neuroinflammation. FASEB J. 2012;26(8):3103-3117.

[13] Zappulla JP, Arock M, Mars LT, Liblau RS. Les mastocytes : de nouvelles cibles pour le traitement de la sclérose en plaques ?. J Neuroimmunol. 2002;131(1-2):5-20.

Source et visuel : AB Science