Café et grossesse : des conséquences sur le cerveau du bébé ?
Des travaux de chercheurs de l’Inserm, publiés dans la revue Science Translational Medicine, décrivent pour la première fois certains effets néfastes de la consommation de café par les souris femelles pendant la grossesse sur le cerveau de leur descendance. Une étude, qui bien qu’ayant recours à un modèle animal, pose la question des conséquences de la consommation de caféine par la femme enceinte.
Les chercheurs ont reproduit chez des souris femelles une consommation de café régulière (équivalent de 2-3 cafés par jour chez l’Homme), tout au long de la période de gestation (19-20 jours) jusqu’au sevrage de la progéniture, en ajoutant de la caféine dans l’eau de boisson.
“Les bébés souris étaient beaucoup plus sensibles aux crises d’épilepsie et, une fois devenues adultes, nous avons observé qu’elles présentaient d’importants problèmes de mémoire spatiale, c’est-à-dire des difficultés à se repérer dans leur environnement” explique Christophe Bernard, directeur de recherche à l’Inserm et principal auteur de l’étude.
L’équipe de recherche est parvenue à identifier le mécanisme par lequel la caféine affecte le cerveau en construction. Pendant son développement, certaines cellules naissent dans des régions cérébrales particulières, puis elles migrent vers les régions dans lesquelles elles sont destinées à fonctionner. C’est le cas des neurones qui libèrent le GABA – un des principaux médiateurs chimiques du cerveau- et qui vont migrer, notamment, vers l’hippocampe, une région cérébrale impliquée dans les processus de mémorisation.
La caféine va directement influencer la migration de ces neurones qui contiennent un récepteur particulier (A2AR). En s’y fixant, la caféine ralentit leur vitesse de déplacement. Ces cellules arrivent alors plus tard que prévu à l’endroit où elles étaient destinées à s’établir. Ce retard de migration va se répercuter tout au long du développement et entrainer des effets néfastes sur le cerveau des souris à la naissance (excitabilité cellulaire et sensibilité aux crises d’épilepsie) et à l’âge adulte (perte de neurones et problèmes de mémoire).
Face à la fréquence de la consommation de café chez les femmes enceintes, les auteurs suggèrent de développer de nouvelles études pour évaluer, à court et surtout à long terme, les conséquences chez les nouveau-nés. Ces derniers ont pu être exposés à la caféine soit pendant la grossesse et/ou pendant l’allaitement, soit dans le cas d’un traitement de l’apnée du nourrisson à base de citrate de caféine. “L’ensemble de ces données permettraient aux cliniciens d’affiner les recommandations élaborées à l’intention des femmes enceintes” explique Christophe Bernard, directeur de recherche à l’Inserm.
“Cette étude est la première démonstration des effets néfastes de l’exposition à la caféine sur le cerveau en développement. Bien qu’elle pose la question de la consommation de café chez la femme enceinte, il est nécessaire de rappeler la difficulté, liée à l’utilisation de modèles animaux, d’extrapoler ces résultats à la population humaine sans prendre en compte les différences de développement et de maturation entre les espèces” , conclut Christophe Bernard.
Ces résultats sont publiés dans la revue Science Translational Medicine, datée du 7 août 2013.
Source ; Inserm – Consommation de caféine pendant la grossesse et effets sur le cerveau en développement