Industrie pharmaceutique : l’emploi retrouve quelques couleurs en 2015
Le Leem a publié les résultats de la dernière enquête Emploi qui indiquent, pour la première fois depuis dix ans, une stabilisation des effectifs de l’industrie pharmaceutique en France. Avec 98 690 collaborateurs recensés à fin 2015 (dernières statistiques disponibles), l’emploi du secteur ne baisse plus que de 0,1 % par rapport à 2014, à contre-courant de la décroissance observée dans l’ensemble de l’industrie manufacturière (- 1,0 %).
L’emploi des entreprises du médicament retrouve ainsi quelques couleurs en 2015. Par ailleurs, selon le Leem, les premières estimations pour 2016 tendent à confirmer une légère reprise de l’emploi dans le secteur pharmaceutique et tablent sur une croissance des effectifs de l’ordre de 0,2 %, une première depuis 2007.
Avec 98 690 salariés en 2015, soit plus de 3 % de l’emploi industriel français, et près de 10 000 recrutements par an en moyenne depuis 10 ans, l’industrie du médicament confirme son rôle moteur dans l’économie française. Ainsi, 45 % des entreprises du secteur enregistrent une progression de leurs effectifs en 2015, soit dix points de plus que l’année précédente.
Le secteur génère un fort emploi indirect
Pourvoyeur d’emplois dans le reste de l’économie, le secteur génère par ailleurs 197 500 emplois indirects : 8 500 personnes environ qui travaillent dans les PME de biotechnologie santé, environ 10 000 personnes, pour tenir compte notamment de certains centres de recherche juridiquement distincts ainsi que des sociétés extérieures de visite médicale et des structures privées de R&D (type CRO’s), 8 500 personnes de l’industrie des principes actifs à usage pharmaceutique. L’effectif de l’ensemble des acteurs de la chaîne du médicament intègre en outre les personnes employées chez les grossistes répartiteurs (12500 personnes), les dépositaires (3000 personnes) et dans les pharmacies d’officine (145 000 personnes). Cet emploi indirect important porte l’effectif de l’ensemble de la chaîne du médicament à environ 296 200 personnes.
L’enquête Emploi du Leem (basée sur les chiffres de 2015) révèle toutefois des situations contrastées en fonction des familles de métiers. La production demeure la famille de métiers la plus importante avec 44% des effectifs (43 666 personnes), en augmentation de 2,3 % par rapport à 2014. En revanche, les effectifs de commercialisation-diffusion (24 682 personnes, soit 25 % de l’emploi total) enregistrent la plus forte baisse (-4,2 %).
L’Ile-de-France, Centre-Val de Loire, la Normandie et Rhône-Alpes sont les principales régions d’implantation de l’industrie pharmaceutique et rassemblent les trois quarts des effectifs des laboratoires. Les établissements du secteur emploient un nombre significatif de salariés dans la quasi-totalité des régions métropolitaines.
Les principales caractéristiques des emplois du secteur
L’emploi du secteur se caractérise par une majorité de salariés en CDI (89,2%) ou en CDD (5,3%) présentant une ancienneté assez élevée (13,2 ans en moyenne) tandis que l’âge moyen des salariés en CDI ou en CDD (43,5 ans) continue de progresser à un rythme de l’ordre d’une année tous les 3 ans.
Le taux de féminisation des emplois dans l’industrie pharmaceutique s’élève à 57% en 2015 alors que ce ratio n’est que de 28% dans l’ensemble de l’industrie manufacturière. Après six années de tendance à la baisse, le taux de féminisation semble se stabiliser.
La pyramide des âges présente un profil élargi dans les tranches d’âge médianes (de 35 à 55 ans). L’intégration des jeunes se fait à un âge assez avancé du fait de la durée de la scolarité associée au niveau d’études des candidats. Le nombre d’alternants et de stagiaires est assez élevé (5 400 stagiaires, apprentis et contrats de professionnalisation) et en progression significative en 2015 (+1 000). La répartition des effectifs selon la classification des emplois traduit le haut niveau de qualification des salariés. Les catégories 6 à 11 des emplois rassemblent désormais plus de la moitié des emplois du secteur en CDI-CDD (51,4%).
En 2015, l’intérim représente 6,2% de l’emploi (en équivalent temps plein), niveau proche des autres secteurs (6,4%). Il a baissé de 1,6% par rapport à 2014. Le recours à l’intérim est plus intensif dans les établissements de production (7,6%) et de distribution/logistique (3,4%), Il est nettement plus modeste dans les activités de R&D (1,6%) et les autres activités tertiaires (5,5%)
L’emploi se stabilise sous l’effet de plusieurs mesures fortes
Selon le Leem, « les entreprises du médicament sont parvenues à endiguer la dégradation de leurs effectifs grâce à des mesures structurantes d’anticipation et de transformation des métiers » et cela « malgré la persistance de mécanismes de régulation inadapté ».
Initiée en 2004, la vaste réforme des métiers de la visite médicale a ainsi conduit à la suppression de 11 500 emplois entre 2004 et 2015. Par ailleurs, en novembre 2016, afin de se prémunir contre une nouvelle dégradation des effectifs du secteur, le Leem a conclu avec quatre organisations syndicales (la CFDT, la CFE-CGC, la CFTC et l’UNSA) un nouvel accord collectif sur le contrat de génération qui comprend plusieurs engagements significatifs en faveur du recrutement des jeunes et des seniors. Le Leem et les partenaires sociaux se sont ainsi engagés à augmenter progressivement la part des jeunes de moins de 30 ans dans les recrutements à hauteur de 30 % et celle des seniors (50 ans et plus) à hauteur de 10 % d’ici trois ans. Cet accord engage également le Leem à réaliser, d’ici la fin du prochain quinquennat (2022), 5000 contrats d’apprentissage ou de professionnalisation par an. 2617 contrats ont été conclus en 2015. Dans un secteur où la moyenne d’âge est de 43,5 ans, cet accord vise à inciter les entreprises du médicament à insérer durablement les jeunes dans la vie active, et à maintenir dans l’emploi, notamment via l’accès à la formation, les salariés de 50 ans et plus. En 2015, les seniors représentaient 29,3 % des effectifs (contre 27, 1% en 2014).
Le Leem a également poursuivi en 2015 sa politique d’intégration des salariés en situation de handicap à travers HandiEm. 993 contrats de travail ont ainsi été signés avec des collaborateurs en situation de handicap, multipliant par deux le taux global d’emploi (3,46 %) depuis 2009.
Des signes de fragilisation qui persistent
Parvenues à stabiliser la dégradation de leurs effectifs, les entreprises du médicament restent très vigilantes sur l’avenir du secteur. Malgré les efforts entrepris pour redresser la barre des emplois, les signes de décrochage demeurent bien réels. En 2016, 13 PSE ont été annoncés, soit 7 de moins qu’en 2015 mais avec un impact plus conséquent sur les effectifs (1715 postes impactés en 2016 contre 1560 postes en 2015).
« Dans un environnement économique marqué par des mécanismes de régulation particulièrement contraignants, il est de plus en plus difficile pour nos entreprises de poursuivre la nécessaire transition de leur modèle économique, scientifique et industriel, tout en préservant leurs effectifs », alerte Michel Ginestet, Président de la Commission des Affaires sociales du Leem. Il y a urgence à mettre en œuvre des mesures sur la régulation, l’accès et la fiscalité qui permettent de maintenir une activité de premier plan en France et de développer l’emploi. »
Un deuxième sujet d’inquiétude concerne la perte d’attractivité industrielle de la France qui se traduit par des difficultés à capter les productions d’avenir (bioproduction…) et par un transfert des activités de R&D vers des pays plus attractifs, notamment en termes d’accès au marché.
Confronté à une myriade de défis organisationnels, le Leem a inscrit la transformation des métiers au rang de ses chantiers prioritaires. Pour Patrick Errard, Président du Leem, « L’évolution des métiers qui a présidé toute la dernière décennie atteint désormais ses limites. L’émergence des bio-médicaments, de nouvelles méthodes de production et du numérique en santé, transforment en profondeur notre savoir-faire et nos métiers. À l’ère du digital, nous avons identifié des besoins nouveaux, notamment en termes de formation de nos collaborateurs. Savoir se transformer, c’est la condition pour être capables d’appréhender les révolutions qui s’opèrent dans le domaine de la santé. »
Source : Enquête emploi annuelle du Leem