La migraine : trois gènes identifiés
On estime que la migraine touche 20% de la population générale soit, 11 millions de personnes en France. Pour la première fois, Tobias Kurth, directeur de recherche à l’unité Inserm 708 « Neuroépidémiologie » et ses collaborateurs internationaux, ont identifié trois gènes pour lesquels une variation génétique est associée à un risque accru de migraine dans la population générale.
Ces résultats, obtenus à partir de données génétiques de 23 230 femmes migraineuses et non migraineuses puis confirmés par d’autres analyses incluant hommes et femmes, suggèrent l’existence de mécanismes communs aux différentes formes de migraines. Les résultats sont publiés dans la revue Nature Genetics.
La migraine est une variété de maux de tête récurrents caractérisée par une forte intensité des douleurs et la survenue fréquente d’autres symptômes tels que des nausées et/ou une sensibilité à la lumière et au bruit. Elle touche 3 à 4 fois plus souvent les femmes que les hommes. Bien qu’une composante génétique ait été soupçonnée depuis très longtemps, seules des formes rares de migraine ont, jusque-là, été associées à l’expression de gènes.
Grâce à l’analyse des données génétiques de plus de 23 000 femmes qui ont participé à l’étude « Women’s Genome Health Study », dont plus de 5.000 migraineuses, Tobias Kurth, directeur de recherche à l’Inserm et ses collaborateurs ont identifié des associations entre la migraine et des variants de trois gènes : TRPM8, LRP1 et PRDM16. Ces associations génétiques ont été confirmées par l’analyse des données de trois études européennes indépendantes incluant des hommes et des femmes. « Les personnes présentant ces variations ont donc plus de risque de développer une migraine. Cette association est observée pour les différentes formes de migraines, ce qui montre l’importance de ces résultats de portée générale« , affirme Tobias Kurth.
Parmi ces trois gènes, deux gènes sont clairement associés à la migraine: d’une part, le gène TRPM8, exprimé dans les neurones, dont le rôle a été mis en évidence dans la sensibilité au froid et la douleur (une des composantes de la migraine), et d’autre part, le gène LRP1, exprimé dans tout le corps, qui interagit dans le système nerveux avec d’autres protéines qui modulent la transmission de signaux entre les neurones. Le 3e gène, PRDM16, semble jouer un rôle aussi bien dans la migraine que dans les autres maux de têtes.
Bien que les mécanismes de la migraine restent mal compris et ses causes sous-jacentes difficiles à cerner, l’identification de ces dénominateurs communs permet d’éclairer les origines biologiques de cette affection fréquente et invalidante » souligne Tobias Kurth. Les chercheurs encouragent désormais la communauté scientifique à mener des études qui permettraient d’expliquer les contributions précises de ces gènes car « cette pathologie pourrait être due à la perturbation de voies de signalisation communes aux différentes formes de migraines » conclue-t-il.
Source
« Genome-wide association study reveals three susceptibility loci for common migraine in the general population »
Daniel I Chasman1,2,23, Markus Schürks1,3,23, Verneri Anttila4,5,22, Boukje de Vries6, Ulf Schminke7, Lenore J Launer8, Gisela M Terwindt9, Arn van den Maagdenberg6,9, Konstanze Fendrich10, Henry Völzke11, Florian Ernst12, Lyn R Griffiths13, Julie E Buring1, Mikko Kallela14,22, Tobias Freilinger15,22, Christian Kubisch16,22, Paul M Ridker1,2, Aarno Palotie4,5,17–19,22, Michel D Ferrari9, Wolfgang Hoffmann10, Robert Y L Zee1,24 & Tobias Kurth1,20,21,24
(1) Division of Preventive Medicine, Department of Medicine, Brigham and Women’s Hospital, Harvard Medical School, Boston, Massachusetts, USA.
(2) Donald W. Reynolds Center for Cardiovascular Disease Prevention, Brigham and Women’s Hospital, Harvard Medical School, Boston, Massachusetts, USA.
(3) Department of Neurology, University Hospital Essen, Essen, Germany.
(4) Wellcome Trust Sanger Institute, Hinxton, Cambridge, UK.
(5) Institute for Molecular Medicine Finland (FIMM), University of Helsinki, Helsinki, Finland.
(6) Department of Human Genetics, Leiden University Medical Centre, Leiden, The Netherlands.
(7) Department of Neurology, Ernst-Moritz-Arndt University, Greifswald, Germany.
(8) National Institute of Aging, Laboratory for Epidemiology, Demography, and Biometry, Bethesda, Maryland, USA.
(9) Department of Neurology, Leiden University Medical Centre, Leiden, The Netherlands.
(10) Institute for Community Medicine, Section Epidemiology of Health Care and Community Health, Ernst-Moritz-Arndt University, Greifswald, Germany.
(11) Institute for Community Medicine, Section Clinical Epidemiological Research, Ernst-Moritz-Arndt University, Greifswald, Germany.
(12) Interfaculty Institute for Genetics and Functional Genomics, Ernst-Moritz-Arndt University, Greifswald, Germany.
(13) Genomics Research Centre, Griffith Health Institute, Griffith University, Gold Coast, Queensland, Australia.
(14) Department of Neurology, Helsinki University Central Hospital, Helsinki, Finland.
(15) Department of Neurology, Klinikum Großhadern, Ludwig-Maximilians-Universität and Institute for Stroke and Dementia Research, Klinikum der Universität München, Munich, Germany.
(16) Institute of Human Genetics, University of Ulm, Ulm, Germany.
(17) Department of Medical Genetics, University of Helsinki, Helsinki, Finland.
(18) Department of Medical Genetics, Helsinki University Central Hospital, Helsinki, Finland.
(19) The Broad Institute of MIT and Harvard, Boston, Massachusetts, USA.
(20) Inserm Unit 708 – Neuroepidemiology, Paris, France.
(21) UPMC Univ Paris 06, F-75005, Paris, France.
(22) On behalf of the International Headache Genetics Consortium (IHGC) (full list of consortium members appears in the Supplementary Note).
(23) These authors contributed equally to this work.
(24) These authors jointly directed this work.
Correspondence should be addressed to M.S. (mschuerks@rics.bwh.harvard.edu) or T.K. (tobias.kurth@inserm.fr).
Nature Genetics, 12 juin 2011
Source : Inserm