Maladie d’Alzheimer : un partenariat public-privé d’envergure pour une détection précoce
L’Institut Pasteur, le CEA, le CNRS et l’Institut Roche de Recherche et Médecine Translationnelle ont signé un partenariat afin de développer de nouveaux outils pour le diagnostic précoce de cette maladie.
La maladie d’Alzheimer (MA) affecte 860 000 personnes en France et ce nombre devrait s’élever à plus de 2 millions en 2040. Lancé le 1er février 2008, le plan Alzheimer 2008-2012 détermine « 3 axes pour agir » : santé, recherche, solidarité. La mesure N° 33 de l’axe II de ce plan prévoit le « développement des liens entre la recherche publique et l’industrie ».
L’Institut Roche de Recherche et Médecine Translationnelle, l’Institut Pasteur, le CEA et le Centre de Recherche de l’Institut du Cerveau et de la Moelle épinière (ICM, CNRS/Inserm/UPMC) s’inscrivent dans cette démarche et viennent de signer un accord de partenariat afin de développer de nouveaux outils d’imagerie médicale pour le diagnostic précoce de la maladie. En effet, disposer de marqueurs biologiques et cliniques permettant de détecter la maladie d’Alzheimer avant l’apparition des signes de démence (phase prodromale) et avant la perte des fonctions cognitives – synonyme de perte d’autonomie – est une priorité, pour les malades comme pour leurs proches.
Deux types de lésions du tissu cérébral coexistent dans la maladie d’Alzheimer : les plaques amyloïdes (ou plaques séniles), qui sont des dépôts extracellulaires de peptides béta-amyloïdes, et la dégénérescence neurofibrillaire, caractérisée par des amas intracellulaires de protéine Tau. Ces lésions constituent véritablement une signature moléculaire de la maladie.
En réunissant leurs expertises, l’Institut Roche de Recherche et Médecine Translationnelle, l’Institut Pasteur, le CEA et le Centre de Recherches de l’ICM (CNRS/Inserm/UPMC) espèrent développer de nouveaux outils de neuro-imagerie permettant de détecter avec un haut niveau de fiabilité les phases précoces de la maladie, et ce bien avant l’apparition des 1ers symptômes.
De nouvelles sondes spécifiques de la maladie d’Alzheimer seront construites à partir d’anticorps dirigés contre les plaques amyloïdes et les lésions neurofibrillaires. Ces sondes, capables de passer la barrière hémato-encéphalique (BHE), seront couplées à un agent de contraste pour permettre une meilleure visualisation par IRM. Au-delà de l’amélioration du diagnostic précoce, ces outils pourraient aussi permettre de mieux évaluer la progression de la maladie, ainsi que les effets de nouvelles thérapies en cours de développement.
Franchir la barrière hémato-encéphalique, un défi scientifique majeur
Pour visualiser les lésions du tissu cérébral et surtout quantifier l’atteinte, les techniques de neuro-imagerie de choix sont des techniques de médecine nucléaire (tomographie par émission de positons et scintigraphie) qui reposent sur l’injection de traceurs radioactifs. Les doses injectées sont faibles, ce qui limite l’exposition des patients à la radioactivité. Le programme scientifique du consortium Roche – Institut Pasteur – CEA – Centre de Recherche de l’ICM est fondé sur l’utilisation de la technique d’Imagerie par Résonance Magnétique (IRM).
Ainsi, comme l’explique Pierre Lafaye, coordinateur du programme qui travaille à l’Institut Pasteur, « les anticorps sont de grosses protéines, elles ne franchissent pas la barrière hémato-encéphalique (BHE) qui protège le cerveau des agents extérieurs. Cette barrière explique en partie les difficultés à mettre au point des traitements efficaces contre les maladies neuro-dégénératives. L’une des étapes clés de la réussite du programme est de parvenir à franchir la BHE. Nous allons coupler un produit de contraste à des fragments d’anticorps de lama suffisamment petits pour la traverser. Ainsi, il sera possible de visualiser les dépôts de peptides béta-amyloïdes et les amas de protéine Tau dans le tissu cérébral de modèles animaux, puis dans celui d’échantillons humains post-mortem », poursuit-il.
Le lama, un animal utile à la recherche contre la maladie d’Alzheimer ?
Le lama est un animal de la famille des camélidés (chameaux, dromadaires) qui fabrique des anticorps naturellement capables de passer la BHE. L’équipe de Pierre Lafaye (Institut Pasteur) possède une expertise unique en biologie moléculaire et ingénierie des anticorps. Elle va mettre au point des fragments d’anticorps spécifiques, possédant les mêmes propriétés que les anticorps de lama et dirigés contre les plaques amyloïdes et les amas de protéine Tau.
A chaque étape du programme, des compétences de haut niveau
L’Institut Pasteur apporte son expertise dans la production et la purification de protéines recombinantes et d’anticorps monoclonaux et dans le couplage de ces anticorps à différents agents de contraste.
L’équipe du Centre de Recherche de l’ICM, experte dans le domaine des maladies neuro-dégénératives, mettra à disposition ses plateformes de microscopie et d’histologie pour la réalisation des analyses morphologiques des tissus neuronaux marqués par les anticorps.
Le CEA et l’Inserm se sont associés pour créer MIRCen, centre de recherche préclinique intégré mettant ses capacités et ressources exceptionnelles d’imagerie au service de la compréhension de maladies graves, telles que les maladies du système nerveux. Grâce à l’imagerie, les chercheurs de MIRCen évaluent de nouvelles stratégies thérapeutiques. Ici, ils vont utiliser l’IRM pour évaluer et visualiser grâce à l’IRM la capacité des fragments d’anticorps à traverser la BHE et à se fixer sur leurs cibles, c’est-à-dire les lésions du tissu cérébral.
Roche apportera notamment son expertise en modélisation animale de la MA, en détection et mesure de biomarqueurs, en pharmacocinétique et pharmacodynamique et en immunotoxicologie.
Arrêter l’évolution de la maladie
La maladie d’Alzheimer fait partie des priorités de Roche, qui s’engage à la fois sur le front du diagnostic et du traitement. A l’origine du programme du consortium, Roche avait lancé en novembre 2009 un appel à projets sous l’égide du ministère de la recherche et de l’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé (Aviesan). En effet, de nouvelles techniques d’imagerie non invasives pour les patients sont nécessaires, afin de visualiser avec une haute résolution les lésions du tissu cérébral, pour une détection plus précoce et une meilleure prise en charge. Les médicaments actuellement disponibles permettent de lutter contre certains effets de la maladie mais ne freinent pas son évolution. Ces techniques pourraient également être utilisées pour mesurer les effets de nouveaux traitements destinés à ralentir le cours de la maladie.
Source : Roche