Maladie d’Alzheimer : le Pr Baulieu annonce une nouvelle piste de recherche
Le Pr Etienne-Emile Baulieu a annoncé, mardi 26 janvier, que son équipe de l’Inserm avait fait une « découverte majeure » dans la recherche d’un traitement et de la prévention de la maladie d’Alzheimer et d’autres démences séniles. Ces travaux, publiés dans la revue américaine PNAS, caractérisent au niveau cellulaire et moléculaire l’interaction entre la protéine Tau, dont la forme anormale est impliquée dans de nombreuses pathologies neurodégénératives, et une protéine très abondante dans le cerveau appelée FKBP52.
Père de la pilule du lendemain et de la DHEA, le Pr Etienne-Emile Baulieu, 83 ans et son équipe de l’Inserm (Unité Inserm 788 « Stéroïdes, neuroprotection et neurorégénération », Université Paris XI), pensent avoir trouvé la protéine anti-Alzheimer, la protéine FKBP52, permettant d’ici quelques années d’obtenir un diagnostic et à plus long terme de traiter la maladie. Deux axes de recherche, qui selon lui pourraient aboutir en 2 à 3 ans, mais qui nécessiteraient « un financement de l’ordre de 5 millions d’euros. »
La protéine Tau est l’un des acteurs majeurs de nombreuses démences que l’on appelle Tauopathies. Naturellement présente dans le système nerveux central, Tau joue un rôle important dans le bon fonctionnement des neurones. Sous sa forme anormale, hyperphosphorylée, la protéine Tau perturbe le fonctionnement des cellules neuronales, favorisant le développement de la maladie d’Alzheimer mais aussi de plusieurs autres formes de maladies neurodégénératives. L’amas de protéine Tau dans le cerveau anormale se manifeste notamment sous forme des « buissons » (tangles en anglais).
Grâce à des outils biochimiques et de biologie moléculaire, les chercheurs ont établi qu’il existait une liaison physique spécifique entre ces 2 protéines présentes dans le cerveau. Ils ont démontré in vitro que la protéine FKBP52 supprimait l’activité de la protéine Tau, et donc empêchait son rôle dans l’assemblage des microtubules, dont on connaît le rôle dans le transport des molécules nutritives et informatives dans la cellule. Les chercheurs observent en effet qu’une forte expression de FKBP52 empêche l’accumulation de protéine Tau dans les cellules nerveuses.
Ces travaux s’inscrivent dans le prolongement des recherches que le Pr Baulieu mène depuis de nombreuses années sur les stéroïdes du système nerveux (« neurostéroïdes ») qui l’ont conduit à s’intéresser à leurs mécanismes d’action et au vieillissement du cerveau. C’est d’ailleurs dans ce cadre que son équipe avait mis en évidence, en 1992, la protéine FKBP52 sans pour autant en élucider la fonction. FKBP52 est une protéine de la famille des immunophilines, qui sont des récepteurs intracellulaires de composés immunosupopresseurs. Cette famille de protéines qui a la particularité de posséder des propriétés immunomodulatrices a été retrouvée dans de nombreux désordres neurologiques, suggérant, dans ce contexte, de nouvelles fonctions distinctes.
« Cette nouvelle activité ‘anti-Tau’ de FKBP52 nécessite de réexaminer les fonctions de cette protéine, initialement identifiée comme modulateur de récepteur d’hormones stéroïdiennes, écrivent les auteurs. L’interaction décrite dans cet article mérite d’être rapidement étudiée plus en détails » concluent-ils. Aujourd’hui, plusieurs collaborations nationales et internationales vont être menées afin de valider les pistes thérapeutiques et diagnostiques pour la maladie d’Alzheimer. Ces travaux de recherche seront soutenus financièrement par la Fondation Vivre longtemps et l’Institut Baulieu.
Source : www.inserm.fr
Voir la vidéo du Pr Baulieu : http://www.dailymotion.com/institut-baulieu
Pour en savoir plus :
« A Role for FKBP52 in Tau Protein Function »
Béatrice Chambraud, Elodie Sardin, Julien Giustiniani, Omar Dounane, Michael Schumacher, Michel Goedert and Etienne-Emile Baulieu. PNAS, early edition 25 janvier 2010