PLFSS 2017 : le Leem s’inquiète de la mise en œuvre des nouveaux mécanismes de régulation
Alors que le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2017 va être examiné en Conseil des ministres, le Leem a interpellé mardi les pouvoirs publics sur les nouveaux mécanismes de régulation du médicament qui, selon l’organisation, « risquent de freiner l’accès à l’innovation ».
« Après quatre années de régulation comptable et malgré le retour de l’innovation, le médicament est de nouveau contraint d’assurer près de 50 % des mesures d’économies », dénonce ainsi le Leem dans un communiqué. « En effet, pour la troisième année consécutive, les économies demandées au médicament atteignent près de la moitié des économies dans le champ de l’Ondam (1,7 milliard d’euros, en incluant les remises) », souligne l’organisation représentative des industriels du secteur pharmaceutique.
Si l’organisation « se félicite du retour des équilibres budgétaires de la sécurité sociale », elle met en garde contre « l’excès d’autosatisfaction ». « Le satisfecit général sur le déficit de la Sécurité sociale est à nuancer, insiste Patrick Errard, président du Leem. Nous invitons la puissance publique à plus de réalisme. Cet équilibre budgétaire est précaire et l’installation, par le PLFSS, de nouveaux mécanismes de régulation spécifiques visant les produits innovants, démontre de façon préoccupante un manque de confiance du gouvernement dans l’efficacité de la régulation conventionnelle. »
Le Leem met également en avant le montant de la contribution des entreprises du médicament au redressement des comptes de l’Assurance maladie. « Ces trois dernières années, sur les 10 milliards d’euros d’économies réalisés par le gouvernement (plan triennal de l’Ondam 2015 – 2017), 5 milliards d’euros viennent des contributions des industriels du médicament », souligne le l’organisation.
Ainsi, selon le Leem, le médicament est aujourd’hui « le poste le mieux maîtrisé de l’ensemble des dépenses de santé ». Une maîtrise qui aurait un coût : « baisse des investissements industriels – 4,5 % entre 2010 et 2013), érosion de la place de la France dans la recherche pharmaceutique mondiale, stagnation de l’activité de production, multiplication des difficultés d’entreprise qui se traduisent par des plans de sauvegarde de l’emploi (11 PSE depuis le début de l’année et déjà 1953 postes supprimés en 2016 contre 1560 en 2015), diminution des effectifs, attractivité du marché érodée par un taux d’imposition général élevé et un taux d’imposition spécifique le plus élevé d’Europe… »
« Des mécanismes de régulation qui tournent le dos à l’innovation »
« Dernier d’une mandature particulièrement pénalisante à l’égard du secteur pharmaceutique, ce PLFSS installe des nouveaux mécanismes de régulation (nouvelles règles sur les autorisations temporaires d’utilisation (ATU), scission du taux L[i] en deux (ville et hôpital), prolongation du taux W[ii]…) qui risquent de freiner l’accès aux traitements innovants », poursuit le Leem.
« Si la récente vague d’arrivée des innovations thérapeutiques sur le marché appelle à un financement approprié et à des mesures de régulation adaptées, elle ne peut se faire au travers d’une enveloppe budgétaire fermée, expression d’une vision comptable court-termiste », indique l’organisation professionnelle.
Le Leem indique ainsi qu’il portera « une attention toute particulière » à deux articles du prochain PLFSS. Concernant la réforme du dispositif des ATU et post-ATU (article 51), le Leem estime que « ce système, à la fois attractif et fragile, pallie aujourd’hui les délais d’accès au marché particulièrement longs en France (408 jours contre 180 prévus par la directive européenne) ». « La fragilisation des ATU serait avant tout une mauvaise nouvelle pour les patients français », poursuit-il.
En ce qui concerne la réforme des règles de fixation unilatérales du prix des produits de santé par le CEPS , le Leem estime que l’article 52 du PLFSS « traduit une vision étatiste des relations entre la puissance publique et les industriels, en contradiction avec la politique conventionnelle qui régit les relations Etat-Industrie depuis 1995 ».
Dans son communiqué, l’organisation appelle ainsi à « une réforme structurelle du système de soins » qui passe notamment par « un renforcement de la politique conventionnelle » qu’elle estime « mise à mal ces dernières semaines tant par la lettre d’orientation ministérielle adressée au président du CEPS qui remet profondément en cause l’Accord-cadre LEEM/CEPS que par l’article 52 du PLFSS qui modifie les règles de fixation des prix des produits de santé ».
Le Leem estime par ailleurs que « le PLFSS n’est qu’un mécanisme de régulation annuelle des comptes de l’Assurance maladie, en aucun cas il ne porte une vision de santé publique » et qu’il s’avère « totalement inadapté pour porter l’indispensable projet de réforme nécessaire à la modernisation de notre système de soins ».
L’organisation estime enfin que « l’Etat et ses satellites n’ont pas le monopole de la détermination de l’avenir de notre système de soins. Industriels, professionnels de santé et patients sont également porteurs de projets. Leur parole est légitime et doit être écoutée comme telle ».
Source : LEEM
[i] Le taux L est une clause de sauvegarde au titre de laquelle les laboratoires reversent un pourcentage de leur chiffre d’affaires au-delà d’une certaine marge de progression. Le PLFSS prévoit pour 2017 un taux ville fixé à 0 % et le taux hôpital à 2%.
[ii] Le taux W est un mécanisme de financement spécifique à la charge des entreprises exploitant une spécialité pharmaceutique dans le domaine de l’hépatite C. L’objectif de ce dispositif est de faire contribuer les entreprises concernées dès lors qu’un certain niveau de chiffre d’affaires est dépassé.